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Le rapport entre le corps et l’âme et la triarticulation de l’organisme humain

Dr Friedrich Husemann

Extrait du livre La médecine à l’image de l’homme tome I – Éditions Triades 1993

Traduction : Dr Victor Bott

C'est dans le livre Des énigmes de l’âme que Rudolf Steiner, pour la première fois, a exposé publiquement en 1917 les résultats de son investigation spirituelle au sujet des rapports entre le psycho-spirituel et le physique-corporel. Sa description de la « triarticulation[1] de l'organisme humain » devait servir d'impulsion à une étude de cet organisme tout entier sous cet angle. Ce n'est qu'à travers une utilisation étendue aux aspects les plus divers que ce point de vue fera la preuve de sa fécondité, qui se révélera en nous le faisant même dépasser. Ainsi verra-t-on que l’on ne peut s'en tenir à l'idée d'un organisme fixe, achevé, mais que ce dernier doit être conçu comme se renouvelant sans cesse, comme en perpétuel devenir, autrement dit comme un système dynamique et non pas statique.

Steiner répartit la vie psychique en faculté de représentation, sentiment et vouloir, et montre que ces activités s'articulent différemment avec l'organisme. La physiologie actuelle reconnait que la représentation, l'activité pensante, a pour base organique les processus nerveux avec leurs prolongements sensoriels d'une part, et l'organisation corporelle interne d'autre part.

Il en va tout autrement des relations du sentiment au corporel. Le sentiment « doit être rattaché au rythme vital ayant son centre dans la respiration et lui étant lié[2] ». Steiner envisage ici ce que l'on éprouve à l'audition musicale. On y trouve deux éléments bien distincts : la perception de la mélodie grâce aux processus se déroulant dans l'organe de l'ouïe et dans le système nerveux, et le sentiment succédant à cette perception, par exemple « l'ambiance sombre du mineur ». Ce que la musique nous fait éprouver prend naissance « du fait que le rythme respiratoire, dans son prolongement vers l'organe de l'ouïe, rencontre ce qu'accomplissent l'oreille et le système nerveux. Ainsi, l'âme ne vit pas uniquement dans ce qui est perçu par l'oreille et dans la représentation, elle vit aussi dans le rythme respiratoire ; elle éprouve ce que ce rythme déclenche parce que les processus neurosensoriels se heurtent à cette vie rythmique. » Même indépendamment de la musique, les courbes respiratoires révèlent les manifestations de l'affectivité.

Citons, parmi une abondante littérature, l'ouvrage de G.A. Roemer[3], lequel présente, à travers de nombreuses expériences, les courbes respiratoires de la peur, de la détente, de la nervosité, de l'apaisement par la musique ou les mathématiques. On connait par ailleurs les expériences faites avec des criminels pour faciliter par l'observation des courbes respiratoires l'élucidation des faits délictueux : les questions présentant un caractère affectif marqué provoquent chez le coupable des inhibitions respiratoires caractéristiques ; ce qui a trouvé une application pratique dans ce qu'on appelle le détecteur de mensonges. Steiner résume ainsi sa façon de voir « L'âme éprouve le sentiment en s'appuyant sur le rythme respiratoire tout comme elle s'appuie sur les processus nerveux dans la représentation. »

 

[1] Driegliederung, aussi traduit par trimembrement

[2] Des énigmes de l’âme, op. cit. Cette citation et les suivantes, sauf mention contraire, sont extraites de cet ouvrage.

[3] Die wissenschafiliche Erschliessung der Innen welt einer Persóklkhkeit (Etude scientifique du monde intérieur d'une personnalité, n.tr.), Bále, 1931.

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